La mondialisation du vagin [...]
Mais qui a peur du mot «vagin» ? C'est la question posée et le tabou levé par une Américaine, Eve Ensler, hier petite fille élevée dans une de ces familles dites ordinaires, mais avec un père incestueux et violent. Cela, on l'apprendra longtemps après le succès mondial de ses «Monologues du vagin». Car Eve Ensler ne s'est jamais posée en victime, au contraire : sa pièce naît d'entretiens recueillis auprès de femmes bosniaques, américaines, africaines... Avant, à sa sortie de l'université en 1975, Eve Ensler a connu l'alcool, la drogue, les galères de l'underground new-yorkais. Jusqu'à ce que le succès de sa pièce, créée devant une soixantaine de spectateurs à Greenwich Village, se répande comme une traînée de poudre, gagne Haïti, l'Inde, l'Afghanistan, et au final cent vingt pays.
En France, «les Monologues du vagin» tiennent l'affiche depuis huit ans, ils ont même été adaptés en langage des signes. Plus de 700 000 spectateurs - et pas que des femmes, loin de là - s'y sont pressés, jusqu'au coeur de l'été dernier, à Paris, au Festival d'Avignon. Une pléiade de comédiennes les ont joués, dont Fanny Cottençon, Micheline Dax, Bernadette Lafont, Marie-Christine Barrault, Valérie Mairesse ou Claire Nebout - et la liste n'est pas exhaustive. Aux Etats-Unis, Glenn Close, Cate Blanchett, Susan Sarandon et Whoopi Goldberg, excusez du peu.
Avouons avoir été rebutée, comme beaucoup, par le titre cru de cette pièce. A tort, du moins sur ce point.
[...] «les Monologues du vagin» ont accouché du V-Day, un mouvement créé en 1998 et qui, à l'occasion de représentations bénévoles, a recueilli à ce jour plus de 50 millions de dollars répartis dans les pays où la pièce a été représentée au bénéfice de foyers de femmes battues, d'écoles, ou de campagnes contre l'excision et le trafic sexuel. Chapeau bas.
[...]Odile Quirot Le Nouvel Observateur - 2286 - 28/08/2008
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